Le meme jour, 6 heures soir
Un grand silence lourd règne ici, à peine troublé parfois par les bruits du village et de la zaouia, les aboiements lointains des chiens ou le rauquement sauvage des chameaux.

El-Hamel ! Comme ce nom est bien donné à ce coin de vieil Islam, si perdu dans la montagne nue et sombre, et si voilé de lourd mystère.

A présent que la raison toute matérielle du pesant malaise où j'étais plongée ces jours derniers m'est révélée, cela va mieux, et j'espère beaucoup du retour à Bou-Saada et du lointain voyage à accomplir vers l'ouest.


(...)vu de la route, El Hamel est placé juste au pied d'un haut massif dont le sommet principal est un cône aigu. A gauche, les collines chaotiques, lépreuses, tantôt des dos arrondis, tantôt des pitons isolés, sur les vallées infertiles. Du coté de l'oued, surnommé El Mogtaa, il y a les vastes jardins des habou et des Chorfa, où les essences à feuilles caduques, actuellement dénudées et d'un violet noirâtre, se marient étrangement aux dattiers toujours verts.

Un dédale de petits murs en brique de toub s'entrecroise dans les jardins plantés au hasard des renflements du terrain accidenté. Sur le bord de la route s'ouvre, au village, quelques boutiques enfumées, des teinturiers, des sekakri. Ici, comme dans tous les ksars, les maisons très variées de forme, mais de couleur monotone participant du sol lui-même, se chevauchent les unes les autres, formant des angles, des ruelles, des passages étroits ou voûtés. Dans le lit de l'oued, la route passe sous deux basses voûtes creusées dans l'argile rougeâtre et pierreux. Pour y passer à cheval, il faut se courber. A droite, El-Hamel, à gauche, le grand cimetière, vraie vallée de Josaphat aux innombrables pierres dressées, puis, sur la hauteur faisant face à la zaouia, le bordj, également en toub, du caïd El-Haidech.

continuer...